Par Brandon Smith – Le 28 décembre 2017 – Source alt-market.com
Parmi les militants de la liberté, il y a un consensus plutôt universel sur ce qui afflige notre nation. Nous comprenons qu’il y a un effort concerté et délibéré de la part de l’establishment pour miner les droits individuels et les protections constitutionnelles. Nous comprenons qu’il y a un effort coordonné des financiers internationaux pour déstabiliser notre économie et siphonner la richesse de la classe moyenne jusqu’à ce qu’elle rende son dernier souffle et meure. Nous comprenons qu’il existe un plan organisé pour radicaliser le public selon des principes idéologiques pour les opposer les uns aux autres. Nous comprenons que la géopolitique et les guerres régionales sont exploitées pour nous détourner des problèmes sous-jacents. Il n’y a pas besoin de beaucoup de débat sur ces réalités ; la preuve est en écrasante.
Cependant, il y a un désaccord constant parmi les activistes sur les solutions à ces problèmes, et il y a plusieurs raisons pour lesquelles ce conflit persiste.
Examinons-les…
Le laisser-aller contre la lutte
Ce n’est pas un conflit que beaucoup de gens reconnaissent ou auquel ils prêtent beaucoup d’attention, mais il constitue une faiblesse majeure qui fait échouer les actions efficaces. Il y a un dégoût chez certains militants de la liberté pour l’idée du sacrifice de soi et de la lutte pour atteindre la liberté. La réalité est que la plupart des combats sont gagnés par la persistance et la force de la volonté ; il n’y a pas de raccourci pour vaincre la tyrannie. Il n’y a pas d’armes secrètes. Il n’y a qu’un esprit indomptable. C’est tout. Peu importe si vous avez un mouvement de cent personnes ou de cent millions de personnes, tout objectif est réalisable, mais seulement si vous acceptez le coût de la douleur et du sacrifice requis.
Au cours de mes années de travail dans le mouvement, j’ai vu des centaines de « solutions imparables » mal conçues prendre leur envol, puis échouer ou disparaître complètement. Dans tous les cas, il y a une période d’excitation excessive alors que les stratégies de mise en pratique sont complètement ignorées. Un exemple parfait serait la déclaration d’amour actuelle entre une sous-culture d’activistes et les crypto-monnaies. Le concept de rébellion dans la virtualité est certainement séduisant pour ceux qui craignent le travail dans le monde et le combat réel. Le fantasme de victoires faciles contre l’establishment appelle ceux qui craignent la lutte. C’est quelque chose dont ces pouvoirs profitent pleinement.
Vaincre une centralisation technocratique concertée ne demande rien de moins qu’une volonté de tout risquer sans promesse de récompense. Plus tôt les gens réalisent qu’il n’y a pas de chemin facile vers une société plus libre, plus vite nous pouvons agir efficacement.
Penser dans le présent contre penser l’avenir
Une vérité que je tente constamment de faire remarquer aux activistes est celle qu’ils ne verront peut-être jamais les avantages des combats qu’ils mènent aujourd’hui. Ils doivent se battre avec la perspective qu’ils ne verront pas la lumière au bout du tunnel. Les combattants de la liberté qui réussissent ne se battent pas nécessairement pour eux-mêmes mais ils se battent tout autant pour la prochaine génération. Ils se battent pour que leurs enfants puissent vivre sans tyrannie, pas seulement pour leur propre libération. Cette idée semble dérouter certains militants, et je blâme pour cela la nature égoïste de notre société et sa dépendance à toute gratification immédiate. Même parmi les meilleurs d’entre nous, il y a une tendance à planifier uniquement le présent et chercher des solutions rapides.
La vraie rébellion nécessite des tactiques à long terme. Les tyrannies profondément enracinées sont réduites au fil du temps, parfois au cours de plusieurs générations. Elles ne sont pas vaincues du jour au lendemain.
Optimisme contre Nihilisme
J’ai vu de nombreux analystes de la liberté attaqués comme des « adeptes de l’apocalypse » mais cette accusation est généralement brandie par des personnes ignorantes qui comprennent mal comment les mouvements de la liberté fonctionnent. Ceux-ci ne fonctionnent pas sur « la peur irrationnelle du désastre ou de l’effondrement » mais sur une bonne dose de réalité couplée avec la philosophie optimiste que la connaissance est le pouvoir. Ce que les sceptiques ne comprennent pas, c’est que nous travaillons à comprendre les subtilités d’une crise parce que nous avons assez d’optimisme pour prévoir que la crise peut être arrêtée, ou que quelque chose de mieux peut être construit.
Nous ne sommes pas des « adeptes de l’apocalypse » nous émettons en fait un cri de ralliement, parce que nous savons que le « désastre » peut en fait être évité.
Les véritables « adeptes de l’apocalypse » sont en fait les nihilistes, des gens qui rejettent aveuglément la possibilité d’une victoire. Ce sont les gens qui ne veulent pas entendre parler de stratégies ou de solutions ; ils ne cherchent qu’à critiquer parce qu’ils n’ont pas l’intelligence d’offrir une solution qui leur soit propre. Ce sont les gens qui disent constamment « Ouais, vous nous avez parlé du problème, mais qu’allez-vous faire à ce sujet » alors qu’ils devraient se demander « Qu’est-ce que moi je vais faire à ce sujet ? ».
Isolement contre Communauté
C’est peut-être l’axe le plus fort de mes années en tant qu’analyste et macroéconomiste, et je continue de me battre pour cela jusqu’à ce jour. La plus grande faiblesse du mouvement de la liberté et de l’Amérique dans son ensemble est, à mon avis, le refus de prendre au sérieux la nécessité de la communauté. Que ce soit à cause de la paresse (facilité), de la paranoïa ou d’une trop grande exposition aux fantasmes hollywoodiens du monde de la survie, beaucoup de gens ont adopté comme philosophie que la préparation à une crise est mieux faite isolément. En d’autres termes, c’est une mentalité de « loup solitaire ».
Dans presque tous les effondrements sociétaux historiques ou modernes connus, ce sont les communautés de personnes organisées ayant les compétences nécessaires qui ont eu le plus de succès dans la survie. Et ce sont ces communautés qui constituent la menace la plus dangereuse pour les oligarchies. Alors, la question devient : qu’espérez-vous accomplir ? Cherchez-vous à survivre ? Si oui, alors la communauté est la meilleure option possible. Cherchez-vous à lutter contre l’empiétement de l’autoritarisme ? Alors la création de nombreuses communautés volontaires et préparées à la catastrophe sont la meilleure arme.
Est-ce que j’enfonce une porte ouverte ? Peut-être. Mais sans communauté, soyez assurés que vous serez toujours le jouet des événements, et jamais l’acteur. La préparation isolée est une recette pour l’échec.
Localisation contre Centralisation
Autant les militants de la liberté s’opposent au problème de la centralisation, autant ils ont tendance à être victimes de leurs propres systèmes de centralisation. La communauté n’a d’importance que lorsqu’elle est VOLONTAIRE et à portée de mains. Cela signifie que les communautés basées sur internet, bien qu’encourageantes parce qu’elles peuvent révéler notre vrai nombre et nous faire sentir que nous ne sommes pas seuls, tendent aussi à centraliser notre activisme dans un faux cadre, nous isolant plus que nous unissant.
Une communauté basée sur le Web n’est pas une communauté, tout comme une solution basée sur le Web n’est pas une solution. Si vous n’utilisez pas le web en partie comme un outil pour construire une communauté localisée dans le monde réel, ou une économie localisée dans le monde réel, alors vous perdez votre temps avec l’activisme sur le web.
Ce que l’activisme Internet fait, malheureusement, c’est donner aux gens un faux sentiment de sécurité, et cela les empêche de poursuivre le projet d’une vraie communauté là où ils vivent. J’ai entendu à plusieurs reprises des militants affirmer que « personne autour d’eux n’est éveillé et conscient ». Ils prétendent être seuls au milieu de milliers, de centaines de milliers, voire de millions de personnes. Ça n’a pas de sens. Dans toutes les régions du pays, j’ai trouvé en masse des gens à l’esprit libéral, souvent tous dans la même ville, à une courte distance en voiture. Et les gens qui prétendent être seuls sont généralement les gens qui n’ont jamais essayé de regarder autour d’eux ou de s’organiser. Pourquoi ? Parce que c’est un travail difficile, et leur communauté virtuelle sur Internet est tellement plus facile.
La source de toute liberté
Au-delà des conflits intériorisés au sein des mouvements de la liberté, il y a une méthodologie déterminante en jeu. L’attraction gravitationnelle qui fortifie les communautés, le carburant qui inspire l’optimisme et le respect en l’avenir, ce qui fait de nous tous plus que ce que nous semblons être en surface. Ce qui surprend les autorités, c’est notre propension au courage et à la bonté humaine. Sans ces deux éléments, tout combat contre la tyrannie est destiné à imploser.
Ce comportement exige de prendre des risques, et tout risque exige du courage (ou peut-être de la stupidité, mais le courage peut souvent être confondu avec la stupidité). Le plus grand effort dans l’histoire de l’humanité est l’effort pour vivre libre. C’est l’une des rares choses dans le monde pour lesquelles il vaut la peine de se battre ou de mourir. Il s’ensuit simplement qu’un objectif aussi fantastique exigerait un risque ultime.
Le courage est la volonté de prendre des risques tout en sachant parfaitement les conséquences de l’échec. Dans certains cas, le courage signifie agir tout en sachant qu’il y aura des conséquences, même en cas de succès. Parfois, il n’y a aucun avantage pour les courageux au-delà de la connaissance qu’ils ont apportée aux autres. Le combat ne débouche pas sur le profit. Le combat ne concerne pas la survie personnelle. Le combat concerne quelque chose de beaucoup plus grand. Quelque chose de difficile à définir, mais intuitivement ressenti.
Prendre des risques terribles avec l’intention de faire du bien aux autres, dont beaucoup ne sont même pas encore nés, exige de la bonté humaine. La bonté en elle-même peut être une forme de risque. Un sociopathe ou un narcissique qui ne pense qu’à lui n’atteindra jamais la grandeur, parce que la grandeur exige des actions contre-intuitives à la conservation de soi. Une personne qui embrasse le relativisme moral ne fera jamais beaucoup pour l’avenir. La bonté exige une résolution morale, pas une « flexibilité » morale.
Ce sont ces deux caractéristiques qui aideront à dissoudre les conflits au sein des activismes de la liberté énumérés ci-dessus. Ce sont ces deux caractéristiques qui permettent de vaincre les tyrans, et ce seront donc ces deux caractéristiques que les tyrans chercheront à miner. Il est difficile de conquérir un peuple quand il n’a pas peur du sacrifice et quand il n’a pas peur de s’organiser dans le monde réel. Il est difficile d’isoler les gens dans leur égoïsme quand ils sont conduits par l’empathie inhérente à la bonté. TOUTES les solutions, toutes les stratégies pratiques s’appuient sur l’existence de ces deux forces au sein d’un mouvement.
En cette fin de 2017, j’espère que tous les militants de la liberté se préparent à des jours plus dangereux. Mais par-dessus tout, leurs préparatifs doivent découler d’une base de lutte et de sacrifice de soi, de prévoyance et d’endurance, de communauté et de mise en pratique, de courage et de bonté. Si ce n’est pas le cas, alors vraiment, à quoi bon ?
Brandon Smith
Traduit par Hervé, relu par Cat pour le Saker Francophone