L’après-Histoire, ou la révolution par le don réciproque et universel


Par Zénon – Le 1er mai 2016

Voici venue la grande braderie. La liquidation de l’ordre ancien et de ses oripeaux. Voici de retour le chaos et ses cohortes d’idiots utiles. La nécessité d’exercer certains réflexes vitaux pour survivre. Sous nos yeux s’accélère la fin des temps que nous connaissions. Et nous assistons effarés aux dernières contractions de l’avènement du monde à venir. Nous sommes en cette fin de cycle confrontés au choix le plus décisif pour le sort de l’humanité : celui de souscrire corps et âme au système marchand dans l’hypothétique espoir de s’en sortir, c’est-à-dire se laisser déposséder de son temps, de son énergie vitale et de sa liberté au prétexte de gagner une vie que l’on a déjà. Ou celui d’œuvrer à notre émancipation véritable, d’abord intérieure puis collective, vis-à-vis du projet génocidaire en cours. Hélas, nous nous trouvons impuissants ; trop tétanisés pour nous prendre en main alors que l’inertie est précisément notre pire ennemie. Nos regards abîmés dans nos écrans de contrôle ressemblent à ceux des lapins brillant aux phares des voitures. Beaucoup vont même jusqu’à taxer d’utopie toute alternative possible à ce grand désastre. Comment avons-nous pu en arriver là ?

Il faut nous figurer dans sa pleine horreur la profondeur du conditionnement dont nous avons fait l’objet dès le plus jeune âge. Celui-ci se fonde sur un système de croyances inculqué du sommet à la base, et bornant la pensée humaine entre les limites qu’on lui impose. À l’école, où la transmission du savoir est nécessairement verticale. Où les connaissances elles-mêmes sont triées, décidées, dispensées et supervisées par l’État. Où toute expression de partage horizontal se trouve systématiquement blâmée ou punie, non par souci d’assurer un enseignement de qualité, mais afin, pour le pouvoir, de poser les bases de son monopole sur les consciences. L’institution scolaire a pour principale vocation d’obtenir des élèves un réflexe pavlovien d’obéissance intellectuelle à l’autorité. Par suite, on prétendra leur fournir les moyens de penser par eux-mêmes, tout en les enjoignant à choisir une discipline, cloisonnée, au détriment insensé de toute autre. Et bien sûr en prenant grand soin qu’aucune tête ne dépasse. Plus tard, l’individu devra rester soumis au diktat quotidien d’un patron, chef ou autre commanditaire quelconque. Jusqu’à devenir incapable d’agir sans en avoir reçu l’ordre. La scène médiatico-politique, les instances répressives judiciaires ou psychiatriques, et surtout l’œil inquisiteur de la norme dont tant d’entre nous se revendiquent, achèveront par ailleurs de garantir que tout est sous contrôle.

À l’exception de ceux instigués par les pouvoirs aux abois contraints de changer d’aspect et ceux résultant d’ingérences étrangères, tous les soulèvements populaires au cours de l’Histoire ont échoué à faire aboutir une véritable révolution. Toujours un despote a su prendre la place du précédent, au damne posthume des sacrifiés sur l’autel du pseudo-changement. Une raison majeure en est, d’une part, que le pouvoir corrompt. Et que la meilleure intention au monde est proportionnellement soumise aux pires tentations. Mais aussi et en premier lieu parce que n’avait pas été préalablement opéré en nous cet affranchissement total et définitif à l’égard de nos peurs, de nos dépendances et de nos illusions. Il n’existe pourtant aucune fatalité à cet état de fait. Il ne dépend que de notre volonté d’ouvrir les yeux et d’apprendre. L’inévitable question qui se pose à la suite d’un tel constat est : comment faire ? Voilà ce à quoi je me propose aujourd’hui d’essayer de répondre.

L’individu aujourd’hui intégré à ce circuit infernal que nous appelons communément le Système s’imagine qu’il ne doit sa subsistance matérielle qu’à sa soumission à ses principes, tant pour ce qui concerne ses possibilités d’apprentissage, ses capacités à nouer des relations sociales, que dans sa légitimité d’agir. Ainsi phagocyté dans tous les pans de son existence par une seule source d’élan, d’inspiration et d’attention, il en ressent un isolement et une solitude creusant davantage son sentiment d’impuissance et de dépendance à l’égard du programme. Ce cercle vicieux se réitère jusqu’à décourager, rendre incapable l’individu d’interagir naturellement avec l’Autre. Et surtout jusqu’à lui faire occulter que si, réellement, personne ne saurait vivre seul, la sortie à ce cauchemar ne réside pas en la mise en concurrence, mais en la complémentarité ainsi que la directe mise en commun des talents. Beaucoup d’entre nous sont lâches. Égoïstes. Quelques-uns profiteurs et avares, sur lesquels il n’est guère utile de s’appesantir… Quelle est la cause exacte du vice ? Quelle est cette part de nous offrant prise en divers endroits à ce mauvais tour qui nous est joué ? Quelle est donc cette entité à la fois commune et propre à chacun qui perpétuellement sectionne, divise, étiquette et catégorise tout ce qu’elle touche et ce qu’elle perçoit ? Rassurez-vous, les amis. Mes trop nombreuses lacunes m’interdisent de m’essayer à une périlleuse leçon de théologie comparée. Mais le mal a plongé ses racines jusque dans la structure de notre psyché. Et si l’on examine à rebours la généalogie des croyances, nous devons admettre que son origine est essentiellement religieuse.

L’Islam est l’église apocalyptique par excellence. Je précise que j’entends ici, par le terme d’apocalypse, son sens initial ; c’est-à-dire celui grec de révélation. Elle est la dernière des grandes héritières du Livre et des monothéismes justement dits révélés. Le Coran nous offre une vision parmi les plus parlantes de cette fin des Temps. Il y est notamment décrit l’actuelle inversion des valeurs, l’éclatement de l’enseignement initial en mille-et-un dogmes et la persécution des derniers croyants. Il professe l’abandon total de l’être à son Créateur, et avec sa bénédiction la conquête de tous les royaumes terrestres. Promet le Paradis à ses adeptes et le châtiment à ses infidèles. Remettre en cause l’authenticité des enseignements de Mahomet n’est pas mon propos. Mais on ne peut nier l’apport à l’islam du judaïsme, notamment pour ce qui concerne son développement politique et son absorption de rites issus des cultes lunaires tribaux de la péninsule arabique.

Le christianisme est pour sa part un culte solaire, comme en témoignent d’elles-mêmes son iconographie traditionnelle ou bien son architecture. Il considère son prophète comme l’incarnation sur Terre du fils de Dieu. Prêche l’amour et la charité envers son prochain, l’humilité, ainsi que le repentir pour ses pêchés. Il attend le retour du Christ et l’instauration de son royaume ici-bas. Offre à ses plus fervents pratiquants l’immortalité au Ciel à l’issue du Jugement dernier, et la damnation dans les flammes de l’enfer à ceux qui se détournent de sa parole. A l’instar de l’islam, le christianisme a usé comme d’un formidable moteur d’expansion l’assimilation de rituels et représentations des peuples auxquels il s’est présenté. Et bien qu’il n’ait été écrit à l’encre du Livre hébraïque mais du sang versé de sa main sacrificielle, il en est incontestablement une autre émanation.

Le judaïsme est en premier lieu d’inspiration messianique. Il se veut le testamentaire d’une longue lignée de patriarches et l’unique dépositaire des tables de Lois. Son credo est la participation à ce qu’il considère comme le Plan divin, lequel doit nécessairement consacrer la Jérusalem céleste et rendre au peuple élu sa terre promise. Le judaïsme est considéré comme la plus ancienne tradition écrite monothéiste. Il vénère un Dieu unique et ineffable, omniprésent, omnipotent et omniscient. Interventionniste dans les affaires humaines, qu’il s’agisse de protéger, par l’avertissement donné à Noé ou encore l’ouverture en deux de la mer Rouge, ou bien de châtier comme le relatent le Déluge, les dix plaies d’Égypte et la destruction de Sodome et Gomorrhe. Son message prophétise la restauration du Temple, le retour d’un Messie qu’il sera censé reconnaître et le salut à ses seuls disciples… J’allais oublier. Le calendrier juif ainsi que bon nombre d’éléments de sa liturgie sont aussi basés sur la succession des cycles lunaires.

Je m’arrête ici pour une parenthèse. Ces trois religions ont pour proposition commune de célébrer l’Unité, la grandeur et la toute-puissance du Principe éternel à l’origine de la Création et de la Vie. En ce sens, l’enseignement des prophètes se trouve en résonance avec des traditions comme le Taoïsme, le Bouddhisme ou avec le message d’Hermès. On pourrait en somme dire que chacune se suffit d’elle-même. Pourtant leur coexistence ne cesse d’entretenir la discorde entre les croyants. Leur antagonisme apparent résulte en réalité du fait que chacune loue un Dieu unique et universel, mais que toutes prétendent paradoxalement réserver le salut à leur seule communauté. Or, il n’est par définition pas d’Unité exclusive. Je ferais ainsi poser la question fondamentale par Ponce Pilate : «Quid es veritas ?». Et lui répondrais par la bouche du grand poète Djallal-ȃd-din-Rȗmi : «La Vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s’est brisé. Chacun en ramasse un fragment, et dit que toute la vérité s’y trouve

Peu importent finalement les noms ou les antériorités. Il est cependant intéressant de constater que les trois dogmes aient systématiquement tenté d’effacer toute trace de leurs ascendances. Car l’origine de ce dont il est ici question et que j’appellerais notre Dualisme ne remonte pas au judaïsme, puisque celui-ci s’est largement inspiré des doctrines et rituels pratiqués à Sumer, en Perse, et du temps de la grande Babylone, notamment au cours de la diaspora du milieu du cinquième siècle avant Jésus-Christ. C’est il y a environ six mille ans, dans cette région du Monde, qu’ont été fondées, sur la base de cette particularité mentale initialement d’ordre individuel, les premières structures sociales hiérarchisées telles que celles que nous connaissons. Les plus anciens écrits retrouvés datent de cette époque et de ce lieu précis, considérés comme le berceau de notre civilisation. Ce qui auparavant relevait du rapport de chacun à lui-même s’est alors vu érigé en système, dominé par une hyperactivité mentale au détriment des intelligences émotionnelle et spirituelle. Ce fut le plein essor de la pensée binaire ayant essaimé parmi les peuples premiers, et parvenue à son apogée depuis la diffusion des technologies numériques. Il est remarquable d’ailleurs que ce basculement corresponde aussi bien au récit biblique de la Chute et de l’exil du jardin d’Éden qu’à la description hindoue de l’ère du Kali Yuga et aux prophéties hopis concernant cette fin de cycle.

Si je me suis permis cette digression, c’est parce qu’il s’agit encore de Babylone dont nous parlons lorsque nous évoquons la matrice où nous évoluons. C’est de Babylone d’où remonte notre penchant quasi-continuel à recouvrir la paix du silence intérieur par les mille-et-une voix tonitruantes et braillardes de notre ego. À vouloir incruster chaque instant vécu à l’agglomérat des souvenirs de celui que nous croyons être. À poser des limites et frontières partout. Nous accaparer la moindre manifestation d’une énergie mouvante et vibrante. C’est notre Babylone intérieure qu’il faut faire tomber avant de pouvoir bâtir un paradis tout à fait réel et concret. Car il s’en trouvera toujours pour détourner à leur profit tout renversement de l’ordre des choses, tant que nous ne serons pas suffisamment nombreux à opposer au mal notre pleine volonté consciente. Chacun doit déconstruire en lui tous ses schémas mentaux pour se libérer. Identifier la source paradoxale de ses besoins et craintes vis-à-vis de l’Autorité. De sa peur du manque, de la nouveauté, de la solitude. De ses attachements et de ses croyances… Il ne faut pas reculer devant l’illusion que la délivrance soit seulement l’apanage d’une poignée d’élus. L’infini est à la portée de tous. Il réside en chaque interlude entre deux pensées. Il est un état de Grâce et de communion avec l’univers qu’il nous est à chaque instant offert de saisir, et dont nous passons la majeure partie de notre existence à nous détourner. Chacun se doit d’opérer en lui ce nettoyage, car la grande expérimentation collective touche à son point d’extrême contraction et approche bientôt son terme.

Je me dois d’émettre une précision : nous ne devons pas confondre le Dualisme avec le mental. Car si ce dernier peut en effet s’en faire le vecteur, il est également un moyen de le transcender. Je vais vous livrer une clef avec laquelle assommer le système. Une fois intégrés la dualité de chaque chose et l’essentielle Unité entre toutes, il devient possible à l’intellect de se placer sur un plan de conscience depuis lequel chaque chose et son contraire apparaissent comme les deux moitiés d’un même cercle. Plus rien ne s’oppose alors. Tout se complète. Un simple effort de décalage de notre attention – un passage de l’un à l’autre versant du problème, permet de ne plus considérer celui-ci comme une impasse, mais un paradoxe à comprendre pour s’élever. C’est en grande partie à la maîtrise de cet art que quelques-uns doivent de nous avoir si longtemps tenus engoncés dans de faux dilemmes… Prenons l’exemple du Pouvoir. Rien ne semble a priori plus difficile que d’abattre un gouvernement, ou encore d’éteindre au plus profond de soi sa volonté de domination. Pourtant, il faut garder à l’esprit que le pouvoir ne correspond qu’à une potentialité, tandis que l’acte, lui, est. Regardons ces marionnettes que nous appelons nos politiciens. Ces gens-là s’agitent, font de grands gestes et parlent tout le temps. Ils discutent des lois, signent des papiers… En réalité, ils ne font rien ! C’est nous autres qui par nos actions quotidiennes façonnons le monde de demain.

Puisqu’ils s’évertuent à inverser nos valeurs et le sens des mots, utilisons leurs armes psychologiques. Généralisons ce réflexe d’inverser notre regard. Il apparaîtra clair qu’ils ne nous tiennent pas par nos faiblesses, mais bien par nos forces. Ou plutôt par l’usage à leur profit de nos propres forces : notre volonté, notre temps et notre énergie. Ce que nous acceptons de leur vendre de nous-mêmes est ce qu’ils craignent le plus au Monde : notre liberté. Et si, a contrario, nous retournions nos prétendues plus grandes faiblesses à notre avantage ? Si nous envisagions que la peur, le manque, les émotions, l’affectivité, sont en vérité autant d’atouts pour leur foutre au cul ? Qu’ils sont les expressions, bien que souvent faussées, d’un imprescriptible Amour de la Vie, lequel ne demande qu’à être exprimé et être reçu. Alors, si au lieu de laisser corrompre ce que nous avons de meilleur et de nous prostituer les uns aux autres, nous offrions tout simplement la pleine mesure de ce que nous sommes ? Cessons de craindre le manque ou le lendemain. Car la vie est uniquement présente. L’être que vous croisez dans la rue, tête baissée, le regard fuyant, n’est en rien différent de vous-mêmes. Il partage fondamentalement les mêmes qualités, les mêmes souffrances, les mêmes failles. Une fois intériorisé que nous sommes acteurs de notre condition commune, le don ne devient plus la dépossession de quoi que ce soit, mais la libre circulation de l’énergie à travers les murs érigés entre tout et tous. Par la nourriture, par le soin, par l’attention et par le sourire, le don est le plus sûr, et en vérité l’unique moyen de renverser l’actuel système, en à peine un battement de paupières. Le plus magnifique, le plus grandiose dans tout cela est qu’il ne sera pas même nécessaire de prendre les armes, que chacun saura immédiatement quoi faire, à quelle place, et que personne ne sera laissé pour compte.

Concrètement, le principe est simple : dès l’instant où j’écris ces lignes et celui où vous les lirez, nous occupons nos postes sans pointer ni rien signer, sans réceptionner ni remettre d’argent. On soigne, on sert, on instruit gratis. On donne, et on reçoit. Si tout le monde s’y met et la condition évidente est que le don trouve suffisamment de réciprocité, personne ne manquera de rien. Seules nos résistances intérieures s’opposent à cette révolution. Mais le système n’y pourra rien : le don est le seul acte qui lui soit totalement étranger. L’argent est l’un de ses outils les plus efficaces pour nous enchaîner. Libérons-nous-en ! Mais puisque notre désertion risquerait, au stade de développement technologique actuel, d’accélérer notre remplacement par des machines, l’idée est de lui préférer la désaffection. L’opération de décalage est indolore, mais foudroyante. Il nous faudra certes un minimum de foi pour y parvenir. Mais au contraire des croyances, qui s’en nourrissent, la foi résulte de toutes les peurs que nous avons su transcender. Dépassons nos craintes et Babylone s’effondrera sur elle-même au bout de quelques jours.

Alors, si vous êtes étudiants : ne tombez ni dans le piège de l’adhésion aux préceptes inculqués par l’autorité, ni dans celui de sa contestation. Même si l’on admet que tout enseignement n’est que propagande, raison de plus pour tenter de déceler leurs failles à travers ce qu’ils veulent qu’on croie. Ne désertez pas l’instruction pour de vains coups de gueule. Vous avez la chance d’apprendre. Profitez ! Mais ne restez pas suspendus au besoin d’obtenir un quelconque diplôme. Il ne serait que la médaille du renoncement. Votre potentiel est de très loin supérieur aux cases dans lesquelles on espère vous faire entrer. Votre devoir est de l’assumer.

Si vous êtes chômeurs, ne perdez plus votre temps aux petites annonces. Parlez-vous. Faites connaissance, vous découvrirez très vite la complémentarité de vos savoirs-faire. De concurrents, vous deviendrez alors des alliés. Et l’alliance est le point de rendez-vous des gens de bonne volonté.

Ouvriers, graissez vos machines. Certaines seront encore utiles à notre bien-être une fois réappropriée la liberté d’en faire ou non l’usage. Occupez le terrain. Faites en sorte que tout soit produit et prodigué gratuitement.

Caissiers ou vigiles de supermarché, vous pouvez laisser pourrir les enregistreuses et les portiques antivols. Que votre métier devienne œuvre de salut public : veillez à une juste distribution des stocks de nourriture et produits de première nécessité. Vous serez ainsi la pierre angulaire de notre succès.

Fonctionnaires, continuez à délivrer toutes les pièces et attestations requises. Mais sans plus inscrire quoi que ce soit dans vos registres. Dispensez les certificats de naissance, inscrivez les mômes à l’école, ouvrez grandes les portes des musées, hôpitaux ou piscines avant d’être privatisés. Et qu’aux yeux surtout de vos supérieurs, il n’y en ait nulle trace. Agents des impôts, focalisez vos efforts à la traque des évadés fiscaux au lieu de harceler les humbles. Votre collecte n’en sera que plus fructueuse.

Médecins, votre tâche est d’ordre sacré depuis les débuts de l’Histoire. Accomplissez-là par le serment que vous avez vous-mêmes prêté, sans rétribution. Il vous en sera rendu au centuple. Agriculteurs, cessez d’empoisonner les récoltes ainsi que nos sols par souci de rentabilité. Ne vous préoccupez plus de quantité. La planète offre assez pour nourrir tout le monde à condition qu’on la respecte. Honorez-la en en partageant tout autour de vous les bienfaits.

Communicants, marketeux, publicitaires et journalistes, destinez-donc à quelque chose d’autre votre incapacité à vous taire. Écrivez-vous des poèmes. Apprenez à marcher sur les mains ou bien copulez. Ça n’aura pas beaucoup plus de sens, mais au moins cesserez-vous de polluer les esprits par votre verbiage.

Policiers ou gendarmes, consacrez-vous à protéger, secourir et venir en aide aux gens, au lieu d’obéir aux consignes de traîtres à la nation. Soldats… Je n’ai pas besoin de vous dire quoi faire ni comment. Vous le savez mieux que moi. Enfin, et vous aurez compris que je ne prône aucunement la guerre, mais si vous voyez de vos fenêtres des hommes armés s’en prendre à des innocents, descendez avec moi dehors et interposons-nous. Si vous ne le faites pas pour vous, faites-le pour l’amour du Ciel.

Il serait trop long d’énumérer l’ensemble des corps de métiers. Mais chacun saura j’en suis sûr appliquer ce principe à sa propre activité. Comme je le disais en introduction, les plus sceptiques rétorqueront que ce n’est qu’un rêve impossible à mettre en pratique. Comment prétendre en être certain avant même d’avoir essayé ? Ne partagez-vous pas, au fond de vous, cet amer sentiment du gâchis de ce cadeau merveilleux qu’est notre existence ? Préférez-vous vraiment, au lieu d’accepter de voir notre condition en face, vous défausser sur vos enfants du devoir de s’en libérer ? Il ne s’agit pas d’un rêve, mais au contraire de s’éveiller de ce cauchemar. Tout n’est qu’affaire de croyances, et lorsque nous cessons de nous attacher à ce que nous prenons pour acquis, nous découvrons toute une infinité d’horizons nouveaux. Je le répète : aucune répression ne saurait faire barrage à un tel mouvement.

Autre chose : qu’il ne soit plus question, par la suite, d’assemblée constituante, de représentativité élective ou de retour à quelque forme de pouvoir centralisé que ce soit. Nous n’entendons plus retomber dans le piège de l’illusion de liberté entretenue par lesdites démocraties. Depuis le temps, on a compris… Le simple mot d’Anarchie semble effrayer bon nombre de gens. On lui associe à tort fréquemment l’idée de chaos. Pourtant, le chaos est l’égarement des peuples par l’exercice malsain du pouvoir. C’est-à-dire le régime que nous connaissons. L’Anarchie est au contraire une forme de société dont le credo collectif est le plein épanouissement de tous et de toutes. Elle s’appuie sur le postulat que la contrainte génère plus de maux qu’elle n’en soulage. Que l’être humain est doué d’assez de sagesse et d’intelligence pour s’autogérer, sans besoin de consignes ou de GPS. Elle implique une maturité qui pour l’instant nous manque dans cette fausse sécurité infantilisante. Mais qui nous viendra au fur à mesure ; au fil de nos succès et de nos échecs, en quelque sorte à la manière du langage pour les enfants. Cette voie, encore suivie minoritairement, sera néanmoins la seule à nous garantir un espoir possible en une transition, que nous aurons préparée, au lieu de l’effondrement qu’on nous sert à tous coins de rue – inutile de se demander à quelle fin.

Que les communes se forment et restent locales. Informelles. Que les cordes vocales résonnent à unir au lieu de juger. Que les efforts soient tendus vers une harmonie sans cesse plus subtile et radieuse. Plus nourricière. Que notre prochaine monnaie soit notre énergie, qui n’est elle-même qu’Amour pur. Et que la raison soit au service du cœur. Car toute la Création a été tissée de ses fils d’or… Notre vie vaut infiniment plus que l’on ne saurait le concevoir. Nous sommes l’union de la Terre au Ciel. Le lien de l’horizontal et du vertical. Nous sommes à l’exacte croisée de l’esprit et de la matière. Nous sommes les relais des Anges sur la planète. Nous sommes indénombrables et chacun unique. Nous connaissons parfaitement la tâche qui nous incombe. Et nous ne sommes qu’UN.

Notre génération sera la dernière de toutes nées comme esclaves. Nos filles et nos fils danseront sur les ruines encore fumantes de nos folies. Puis les fleurs refleuriront sous l’asphalte en miettes. Le soleil bénira chaque instant de nos retrouvailles. Et peut-être, un jour pas si lointain, nous retournerons-nous en arrière pour nous rendre compte que tout, je dis bien absolument tout, aura été nécessaire à notre évolution jusque-là. Alors comprendrons-nous que rien n’est exclu de Dieu, par quelque nom qu’on l’appelle. Que même le mal participait sans le savoir à la réalisation suprême. Nous fermerons les yeux avec sous les paupières gravée l’infinie grandeur du Plan céleste. Le Grand-Œuvre aura été accompli.

Zénon

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