La société du pire, qu’est-ce que ce serait ?
Par Fred Deion − Octobre 2017
La société du pire, serait-ce celle où la crise économique serait permanente, avec son cortège d’austérité, de perte de pouvoir d’achat et de précarité ? Où l’intelligence artificielle, sous prétexte de compétitivité et de mondialisation, remplacerait l’employé par des robots, qui enrichissent leurs propriétaires, mais qui ne consomment pas…
Début octobre, dans une interview à Bloomberg Markets, Sergio Ermotti, le CEO de la banque suisse UBS, a indiqué que la technologie pourrait se substituer à ses salariés, entraînant des dizaines de milliers de suppressions de postes au sein de l’entreprise qu’il dirige. Il estime aussi que les entreprises fabriquant des produits pourront diviser par deux leurs effectifs.
La société du pire, serait-ce celle où la sphère privée serait abolie ? Qui renoncerait pourtant à son existence virtuelle, en se retirant des réseaux sociaux, où règne la dictature du paraître ? Qui renoncerait aux objets connectés, smartphones et toutes ses applications intrusives, comme la géolocalisation et les messageries non sécurisées ?
Mi-octobre, une faille de sécurité majeure des réseaux wifi est médiatisée : le protocole de chiffrement WPA2 est vulnérable, ce qui rend possible le vol d’informations comme les numéros de cartes bancaires. Ceci n’est que la plus récente des nombreuses mises en garde déjà rendues publiques, comme celles concernant aussi l’internet des objets destinés au grand public (bracelets connectés, etc.), aux propriétaires via la domotique (serrures connectées, caméras et systèmes d’alarme connectés), et aux professionnels (risques liés à la sécurité des données). Quatre-vingt pourcents des objets connectés présenteraient de potentielles failles de sécurité.
La société du pire, serait-ce celle où la finance ferait la loi, malgré sa fragilité et son instabilité ? Après la crise de 2007-2009, il y a toujours aujourd’hui des banques en difficultés, mais certains appellent à une nouvelle dérégulation…
Grâce aux taux d’intérêts bas, l’endettement n’a jamais été aussi élevé, que ce soit aux USA (État fédéral, cartes de crédit, prêts automobiles et étudiants, dettes contractées par les entreprises), en Chine (investissements massifs dans les infrastructures) et ailleurs. Malgré ces créances douteuses, les bourses sont au plus haut, les actions, survalorisées. Encore combien de temps, avant que la prochaine bulle n’éclate ?
La société du pire, serait-ce celle où on peut payer partout avec son téléphone portable, dans une société sans cash ? Ce qui obligera chacun à déposer tout son argent sur un compte, permettant d’imposer des taux négatifs à toute la population, et ainsi, d’introduire un impôt sur l’épargne…
Ce qui permettra également de ponctionner les comptes en cas de krach, pour renflouer les banques (« bail in », comme à Chypre en 2013)… De plus, qu’adviendra-t-il des dépôts en cas de problème informatique ou électrique ? Les citoyens accepteront-ils de céder à leurs gouvernants le pouvoir de contrôler, de manipuler, de confisquer leur épargne ? Un projet de l’Union européenne, révélé cet été par Reuters, autoriserait le blocage des comptes bancaires durant 20 jours pour éviter toute ruée aux guichets (« bank run »)…
La société du pire, serait-ce celle où on prive le citoyen honnête et responsable de certaines de ses libertés fondamentales, comme celle d’avoir les moyens de se protéger dans le respect de la légitime défense et des lois en vigueur y étant relatives ? La directive européenne EU 2017/852, entrée en force cette année, restreint considérablement le droit d’acheter et de détenir légalement une arme à feu sous prétexte de lutter contre le terrorisme.
Pour rappel, les principaux modes opératoires utilisés par les djihadistes en Europe ont été les armes blanches (Marseille, Londres, Magnanville, Wurtzbourg, St-Étienne-du-Rouvray), et les véhicules béliers (Nice, Berlin, Londres, Stockholm, Barcelone). Moins utilisés ont été les attentats à la bombe, comme à Bruxelles, ou les armes achetées illégalement sur le marché noir, comme à Paris. Conclusion : depuis 2015 en Europe, le nombre de victimes d’actes terroristes par armes achetées légalement chez un armurier (visées par cette nouvelle directive) s’élève à… zéro. Et pourtant, on choisit de stigmatiser les tireurs sportifs, chasseurs, collectionneurs, en ne les considérant plus comme dignes de confiance, en les suspectant comme des criminels en puissance, et en les assimilant à des terroristes potentiels.
La société du pire, serait-ce celle où l’offre de divertissement serait presque illimitée ? Nous avons à disposition un nombre pléthorique de chaînes de télévision, de médias, d’informations, d’images.
Sommes-nous plus instruits pour autant ? la télé-réalité, les fake news, les contenus futiles ou abrutissants sur YouTube ou ailleurs ont pris le dessus.
Cette société du pire, c’est pour quand ? Ou y sommes nous déjà ?
Fred Deion