Pourquoi Israël n’a lancé qu’une petite attaque contre l’Iran ?


La rédaction du magazine – Le 26 octobre 2024 – Source Military Watch

L’armée de l’air israélienne a lancé une attaque à petite échelle contre la capitale iranienne Téhéran, des rapports indiquant que des explosions ont été entendues par des habitants, mais aucun signe de dégâts ou d’explosions au sol n’a été observé. Des sources iraniennes ont rapporté que des missiles aériens israéliens avaient été lancés contre plusieurs bases aériennes autour de Téhéran, sans succès car les missiles ont été interceptés en route vers leurs cibles. Les explosions entendues ont été attribuées par des sources locales à l’utilisation de missiles sol-air pour intercepter les attaques, ce qui correspond au manque d’images d’explosions réelles au sol à Téhéran ou à proximité. Cela concorde également avec les rapports des services de renseignement américains fuités disant qu’Israël prévoyait d’utiliser des missiles balistiques lancés par voie aérienne à longue portée pour frapper l’Iran – qui seraient en mesure d’atteindre leurs cibles tandis que les avions resteraient bien en dehors de la portée des défenses aériennes iraniennes.

La faible ampleur de la frappe israélienne soulève des questions quant à son objectif, trois possibilités ayant émergé :

La première option est que l’attaque visait à tester les défenses aériennes iraniennes, potentiellement en préparation d’une attaque à plus grande échelle à l’avenir au cours de laquelle les planificateurs israéliens seront plus familiers avec les défenses iraniennes. Un tel test pourrait également détourner l’attention des forces iraniennes vers Téhéran, ce qui pourrait être bénéfique si la cible principale d’Israël était ailleurs.

La deuxième option est que les avions israéliens de la première vague ont vu leurs attaques de missiles interceptées avec succès, comme le prétendent des sources iraniennes, ce qui a conduit à l’annulation des vagues de frappes suivantes car celles-ci seraient également inefficaces.

La troisième option est que la frappe était conçue comme une démonstration de détermination à l’attention du public national en Israël. L’Iran s’étant engagé à riposter durement et à une échelle sans précédent à toute attaque israélienne, une frappe à très petite échelle pourrait potentiellement être négligée par Téhéran tout en permettant aux dirigeants israéliens de maintenir leur crédibilité au niveau national et de satisfaire les appels nationaux à des représailles, tout en évitant l’escalade. Les responsables israéliens se sont engagés depuis le 1er octobre à frapper des cibles iraniennes, en réponse à une frappe de missile iranienne à grande échelle ce jour-là qui a visé d’importantes installations militaires et liées au renseignement dans le pays et causé de graves dommages aux principales bases aériennes. La frappe iranienne répondait à la fois à une attaque aérienne israélienne contre la capitale iranienne Téhéran, le 31 juillet, et à l’échec des alliés d’Israël à faciliter la désescalade alors que Tel Aviv lançait une vaste campagne de bombardements contre le Liban voisin.

Military Watch

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Le Blog d’Andrei Martyanov − Le 26 octobre 2024

Comme si cela n’était pas déjà clair auparavant.

  1. Pour les “journalistes” ; “explosions à Téhéran” ne veut pas dire “explosions À Téhéran“. La plupart du temps, ce fut le travail de la défense aérienne et des “explosions dans le ciel AU-DESSUS DE Téhéran“.
  2. Le modèle de salve et la question des “fuites” décrivent parfaitement tout SEAD (Suppression de la Défense aérienne Ennemie). Israël n’a AUCUNE ressource pour mener cela contre l’Iran.
  3. Quels que soient les “fuites” qu’il y a eu, elles ont très peu nombreuses et, malheureusement, ont réussi à tuer 4 militaires iraniens.
  4. Peu importe ce qu’Israël a lancé la majeure partie a été interceptée. Je n’en connais pas le pourcentage mais il est très élevé. L’OTAN est sous le choc face à l’efficacité de la défense iranienne, tout comme Israël.
  5. La dissuasion a fonctionné, c’est clair. Israël ne s’est jamais remis de sa surprise face aux capacités de frappe iraniennes le 1er octobre, et maintenant l’Iran a démontré qu’il pouvait se défendre. Ce n’est pas ce à quoi l’OTAN et Israël sont habitués lorsqu’ils tuent des civils sans défense.
  6. Le président américain Joe Biden a exprimé l’espoir que les frappes de Tsahal marquent la fin de l’escalade au Moyen-Orient. “Il semble que [Israël] n’ait rien touché d’autre que des cibles militaires. J’espère que c’est la fin”, a-t-il déclaré aux journalistes à Philadelphie. Il a ajouté qu’il avait été informé à ce sujet par la communauté américaine du renseignement.

C’est vrai, la seule chose qui reste à Israël et à Washington est d’espérer que l’Iran ne riposte pas, car cela pourrait être bien pire que le 1er octobre et Israël espère que Poutine s’engage et calme ses homologues iraniens.

C’était militairement faible de la part d’Israël, c’est le moins qu’on puisse dire, il n’est pas dans la même catégorie. Je me demande si les Iraniens veulent détruire le THAAD qui sera fourni à Israël, s’ils décident (espérons que non) de riposter.

Et voici un commentaire posté après une discussion manifestement extrêmement réussie hier entre Nima, Larry et moi :

En tant que musulman sunnite, je dis qu’Andrei a raison sur ce qui se passe dans le monde sunnite. Environ la moitié redoublent de haine envers tout ce qui est chiite et s’enracinent de plus en plus dans le nationalisme laïc, mais l’autre moitié envisage sérieusement un monde musulman uni sous la direction de l’Iran. Nous, sunnites, commençons à penser qu’Allah a béni l’Iran.

Beaucoup de gens ne peuvent toujours pas saisir le gigantesque changement mental qui est en train de se passer dans la Oumma, dans le contexte d’un Iran qui ne parle pas mais qui agit. C’est vraiment métaphysique. C’est tellement gigantesque que je ne trouve pas de termes appropriés pour le décrire mais la rue arabe en prend note… C’est un grand moment.

Andreï Martyanov

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

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