Par Ugo Bardi – Le 4 août 2017 – Source CassandraLegacy
On a dit que le meilleur tour du diable est de vous convaincre qu’il n’existe pas. Il en est de même pour la propagande, qui tire la majeure partie de sa force de son pouvoir de convaincre les gens qu’elle n’existe pas. Pourtant, elle existe et son impact sur la vie des gens est gigantesque. Plus nous essayons de l’ignorer, plus cela nous affecte, en particulier ceux d’entre nous qui prétendent en être à l’abri.
Pourtant, il semblerait que la propagande ne peut fonctionner que si elle peut éliminer ou marginaliser les voix de l’opposition dans son environnement. Peut-être que le concept de « presse libre » est un peu optimiste aujourd’hui dans le monde occidental. Pourtant, avec Internet, tout le monde peut vérifier les déclarations des médias et il ne manque pas de voix d’opposition dans la galaxie des réseaux sociaux et des différents sites des médias indépendants. Cela avait amené quelqu’un à prophétiser « la fin de la manipulation ».
Est-ce que la propagande a été affaiblie par le Web ? Difficile à dire, mais certains exemples indiquent que quelque chose a changé. Un bon exemple est l’attaque contre la Russie. Cela a été fait littéralement dans les règles, en appliquant toutes les recettes connues qui ont bien fonctionné dans le passé. En particulier, c’était basé sur la diabolisation du méchant du moment, Vladimir (« Vlad ») Poutine, accusé d’être un dictateur sanglant et par rapport à, eh bien, vous devinez qui !
L’objectif réel, cependant, est maintenant d’utiliser le travail de démonisation déjà fait pour abattre le tant détesté Donald Trump, de plus en plus accusé de connivence avec les méchants Russes. Cela a-t-il fonctionné ? En bref, non. Au moins pour ce qui était son but principal, celui de faire tomber Donald Trump, c’est un échec total. Malgré le lot quotidien de toutes sortes d’accusations disant que Trump est l’homme de paille de Poutine, l’idée n’a tout simplement pas pris. Même parmi ceux qui désapprouvent Trump en tant que président, l’idée qu’il est en quelque sorte relié ou en train de travailler pour la Russie et Poutine est très peu mise en avant parmi la liste des critiques.
Mais cela ne signifie pas que la propagande anti-russe n’a pas fonctionné. Voici quelques résultats récents du sondage Gallup :
Le barrage de nouvelles anti-russes sur les médias traditionnels a clairement eu un certain effet, avec 70% des Américains ayant une opinion défavorable de la Russie. Donc la propagande fonctionne toujours, semble-t-il.
Oui, mais seulement dans certaines limites. Si nous comparons ces données avec celles de l’Irak, nous constatons qu’en 2003, 93% des Américains (!!) ont déclaré avoir une opinion défavorable sur l’Irak. C’était un véritable triomphe de la propagande moderne qui a pu obtenir ce résultat sur la base d’une manipulation totale : celle des « armes de destruction massive » prétendument déployées en Irak. Une telle vue extrême de la Russie semble peu susceptible d’être atteinte aujourd’hui.
Alors, pourrait-il être vrai que la propagande ne fonctionne plus si bien et si subrepticement que dans le passé ? Ou est-ce Trump le fou qui perturbe tout ? La seule chose que nous pouvons dire, c’est que la propagande peut s’être affaiblie un peu, mais c’est toujours une arme formidable du moment où elle a été développée sous sa forme moderne par des gens comme George Creel et Edward Bernays.
Pourtant, à la longue, même les engins les plus merveilleux sont soumis à la falaise de Sénèque. Et l’une des raisons pour lesquelles les empires s’effondrent est due aux montagnes de mensonges que les élites racontent à leurs sujets. Cela s’est produit dans le passé, il se peut que cela se reproduise. C’est même probable.
Ugo Bardi
Traduit par Hervé, vérifié par Wayan, relu par Cat pour le Saker Francophone