Quand la petite vertu de Google est à vendre


Les législateurs américains exigent des réponses de Google au sujet d’un moteur de recherche adapté aux besoins de la censure chinoise


Lawmakers Demand Answers from Google Over Chinese Censorship Project


Note du Saker Francophone

Dans le contexte US où les suspects usuels, Facebook, Google, YouTube etc. ferment à tour de bras l’accès aux sites conservateurs - entre autres celui dont cet article est extrait - c'est une vraie friandise pour l'esprit de voir la vertu outragée de la Chambre des représentants étasuniens se réveiller lorsqu'il s'agit de vendre aux Chinois les capacités de censure offertes par le moteur de recherche de Google, déjà amplement utilisées auprès des internautes occidentaux.

Si Paris vaut bien une messe, le milliard et demi de consommateurs chinois vaut bien un petit arrangement avec les valeurs consacrées

Par Mikael Thalen – Le 14 septembre 2018 – Source InfoWars

Le groupe bipartite, dirigé par le représentant David Cicilline (D-R.I.), comprend 16 membres de la Chambre des représentants américaine.

Dans une lettre publiée jeudi sur Twitter, Cicilline et ses collègues ont exigé que le PDG de Google, Sundar Pichai, réponde aux questions sur le projet secret appelé « Dragonfly ».

« Google ne devrait pas aider la Chine à sévir contre la liberté d’expression et la dissension politique », a écrit Cicilline. « Je viens juste d’envoyer cette lettre à certains de mes collègues républicains et démocrates, soulignant nos sérieuses inquiétudes et nos questions sur ce qu’ils font. »

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La lettre remet en cause la décision de Google et note que la société a retiré du marché un moteur de recherche similaire en 2010 après que la Chine a censuré ses citoyens et a même tenté de pirater les systèmes de Google.

« Le gouvernement chinois surveille régulièrement les discours et les activités des militants, des minorités religieuses et de toute personne qui, à leur avis, constitue une menace pour la domination du Parti communiste chinois », indique la lettre.

« Depuis que Google a quitté la Chine en 2010, la censure s’est aggravée avec l’adoption et la mise en œuvre d’une nouvelle loi sur la cybersécurité qui obligerait notamment les fournisseurs de réseaux à stocker certaines données directement auprès du gouvernement chinois. »

De nombreuses questions à la fin de la lettre demandent également à Google de révéler quels « termes, mots ou événements » seront censurés et si les citoyens chinois et les Américains vivant à l’étranger seront surveillés à l’aide de la technologie de Google.

La lettre ajoute : « En tant que décideurs, nous avons la responsabilité de veiller à ce que les sociétés américaines ne perpétuent pas les violations des droits de l’homme à l’étranger et de nous assurer que le statut de nos systèmes et nos régulations soient en mesure de gérer les changements dans l’environnement du monde des affaires ».

La lettre a été publiée le même jour qu’un rapport de The Intercept, qui a, le premier, révélé l’existence de Dragonfly, relatant en détail comment un scientifique de haut niveau avait démissionné de Google pour protester contre le projet.

Jack Poulson, qui a travaillé chez Google comme chercheur principal dans le département de recherche et d’intelligence des machines, a déclaré à The Intercept qu’il avait la « responsabilité éthique de démissionner » suite à la « déchéance de nos engagements publics en matière de droits humains ».

Dans une lettre de démission adressée à ses dirigeants chez Google, Paulson a également averti que « d’autres pays tenteront de tirer parti de nos actions en Chine pour exiger que nous respections leurs exigences en matière de sécurité ».

« En raison de ma conviction que la dissidence est fondamentale pour le fonctionnement des démocraties, je suis obligé de démissionner pour éviter de contribuer à l’érosion de la protection des dissidents ou d’en profiter », a écrit Poulson. « Je considère que notre intention de capituler devant les demandes de censure et de surveillance, en échange de l’accès au marché, comme une trahison de nos valeurs et de la position de négociation du gouvernement à travers le monde. »

Alors que seulement cinq employés auraient démissionné à cause du projet, plus de 1 400 employés de Google ont signé une lettre à leur PDG, Pichai, le mois dernier pour demander des réponses.

« Actuellement, nous ne disposons pas des informations nécessaires pour prendre des décisions éclairées sur le plan éthique concernant notre travail, nos projets et notre emploi. La décision de développer Dragonfly a été prise en secret et a progressé avec les principes [d’intelligence artificielle] mis en place, ce qui montre clairement que les principes à eux seuls ne suffisent pas », indique la lettre. « Nous avons un besoin urgent de plus de transparence, d’un siège autour de la table et d’un engagement à des processus clairs et ouverts : les employés de Google doivent savoir ce que nous construisons. »

Un groupe d’organisations de défense des droits humains de premier plan a également écrit une lettre à Pichai le mois dernier pour demander à Google de cesser immédiatement son implication dans Dragonfly.

« Comme beaucoup d’employés de Google, nous sommes extrêmement préoccupés par les informations selon lesquelles Google développe une nouvelle application de moteur de recherche censuré pour le marché chinois », indique la lettre. « Le gouvernement chinois viole largement les droits à la liberté d’expression et à la vie privée ; en acceptant la répression des dissidents par les autorités chinoises, Google participerait activement à ces violations pour des millions d’internautes chinois. »

Jusqu’à présent, Google a refusé de commenter publiquement le projet, tandis que Pichai, au début de ce mois-ci, avait refusé de se présenter devant la commission du renseignement du Sénat pour discuter de la question.

Mikael Thalen

Traduit par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone

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