L’impérialisme militaire français est en bonne voie…


Par Michel J. Cuny − Octobre 2016
Résultats de recherche d'images pour « Livre blanc sur la défense »Ce livre suit bravement la piste que lui a tracée le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale élaboré et publié en 2008, sous le règne de Nicolas Sarkozy…

L’attaque et la destruction de la Libye l’ont illustré à merveille, mais ce n’est évidemment pas fini.

En effet, et rien qu’en passant, il nous rappelait, dès la page 44, que certains espaces étaient déjà à portée de fusil :
«Les pays européens sont présents militairement à des titres divers, au Tchad, en Palestine, au  Liban, en Irak et en Afghanistan. Dans ces conditions, l’Europe et la France sont probablement appelées à s’engager davantage encore à l’avenir dans l’ensemble de la zone, pour aider à la prévention et au règlement des crises.»

Il faut donc en tirer les conséquence jusqu’au bout :

«La France et l’Europe ne peuvent se désintéresser du continent qui leur est le plus proche.  L’Afrique, riche de nombreux atouts, dispose d’un potentiel humain et économique considérable. À long terme, ces capacités pourraient lui permettre de figurer parmi les acteurs de premier plan de la croissance économique et de la sécurité mondiales. Néanmoins, la poursuite de l’essor démographique, la faiblesse des structures étatiques et la mauvaise gouvernance risquent de freiner encore longtemps le développement et une répartition équitable de ses gains.» (page 44)

… qui pourraient devenir les nôtres… un tout petit peu : il va donc falloir y mettre bon ordre… en  faisant régner l’équité que promet la mise en œuvre des droits de l’homme (à coups de fusil)…

Le Livre blanc nous l’a donc rappelé dès 2008 : il y a un gâteau africain.

Africain, sans doute… Mais n’est-il qu’africain ? La France ne pourrait-elle pas, pour le compte  de l’Europe, faire elle-même les parts ? Tout en respectant la pauvreté locale ordinaire ? Mais si, certainement :

«L’abondance de matières premières stratégiques et de ressources énergétiques appelle une  valorisation, d’abord au bénéfice des populations africaines elles-mêmes. Elles constituent une  ressource essentielle pour l’Afrique. Par ailleurs, elles peuvent contribuer à favoriser les  technologies européennes. Une stratégie européenne organisant un partenariat équilibré avec les pays concernés, pour un accès équitable à ces ressources, doit donc être mise en œuvre.» (page 45)

Équilibre, équité… Les droits de l’homme (à coups de fusil) pointent le bout de l’oreille. Imaginons alors les Africains, occupés à venir en France pour y faire régner l’équilibre et l’équité autour des richesses naturelles… et surnaturelles… essentielles à celle-ci. Ils seraient bien bons… Mais ils auraient sans doute à refranchir très vite la frontière au triple galop.

Or, la France, en Afrique, a, quant à elle, des troupes au sol, dans les airs et au-delà des airs, et sur l’eau et sous l’eau… et puis quantité d’autres moyens tout à fait convaincants. Elle y a même pris racine.

Car, si la France – et derrière elle l’Europe – s’efforcent de caresser le monstre dans le sens du poil, elles savent tout de même que c’est effectivement un monstre… Voilà ce que le Livre blanc se charge de nous rappeler, ou de rappeler à ses zélites :

«L’Afrique subsaharienne est une des seules régions du monde où la pauvreté a augmenté, en dépit d’une croissance économique soutenue depuis le début des années 2000. À l’horizon 2030, la Banque mondiale estime à 3,3 % par an le taux de croissance réelle du PIB de cette partie du continent. Compte tenu du taux d’accroissement démographique annuel de 2,5 %, la population sera de 1,04 milliard d’habitants en 2025. Le risque d’une évolution relativement faible du PIB par habitant demeurera élevé.» (page 46)

Surtout dans le cadre d’un équilibre et d’une équité dûment infligés par le capitalisme, le colonialisme et l’impérialisme occidentaux…

D’un point de vue intérieur à l’Afrique subsaharienne elle-même, ce ne serait bien sûr pas une nouveauté… Et d’ailleurs, cela ne nous regarde pas… Nous ne faisons pas de l’ingérence… Pas plus qu’il ne le faut… Ce qui n’empêche pas qu’il y ait tout de même un hic majeur. Ce que le Livre blanc s’empressait de nous signaler il y aura bientôt dix ans :

«Certaines conséquences de cette situation sont d’ores et déjà identifiées : augmentation du nombre et de la taille des mégalopoles ; rareté alimentaire aggravée par les atteintes à la biosphère, le réchauffement climatique et l’augmentation de la demande ; risques épidémiques et absence de structures sanitaires adéquates (sida et paludisme notamment) ; croissance de la population dont plus de la moitié aura moins de 25 ans en 2025, avec d’importants taux de chômage ; fortes poussées migratoires, y compris en direction de l’Europe.» (page 46)

L’Europe, malheureux ! … L’Europe !

Qui n’aura pas tort de saisir l’Afrique à la gorge, et dans les meilleurs délais ! … Sous la  conduite déterminée d’une France impériale ! … Oh, les beaux jours…

Et tout cela, grâce à une Cinquième République qui n’a pas été mise en place par un Charles de Gaulle pour ce qu’un vain peuple pense… Car c’est bien elle qui organise, dans le dos des citoyennes et des citoyens, ce domaine «réservé» des présidents de la République… Et c’est bien elle qui permet l’étouffement du suffrage universel, tout en prétendant faire tout dépendre de lui. Elle est en effet d’une provenance plus que douteuse, ainsi que le montre l’ouvrage électronique que je viens de publier (Michel J. Cuny, Pour en finir avec la Cinquième République – Histoire de l’étouffement du suffrage universel, Éditions Paroles Vives).

Michel J. Cuny

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