Les chiens de la vengeance


Par James Howard Kunstler – Le 24 août 2018 – Source kunstler.com

L’histoire a une vitesse qui lui est propre, et ses forces implacables entraîneront le bon, le mauvais, le désemparé, l’intelligent, le coupable, l’innocent, l’avide et le réticent vers un certain destin. On peut facilement voir une convergence des vecteurs poussant la nation vers la criticité politique cet automne.

M. Trump est comme une brute stupide malheureuse des anciennes forêts teutoniques avec une muselière lui serrant le nez, le reste de la meute tout près de lui, mordant ses mollets et son bas ventre si doux. À son désespoir ne répond que l’indifférence des arbres dans la forêt, de la lune froide au-dessus et de tous les autres faits de sa réalité tragique.

Comme ces choses ont tendance à se produire, il semble que les efforts de Robert Mueller soient passés des allégations de graves infractions de collusion avec un ennemi étranger à celles d’avoir batifolé avec une salope. Pour corser l’affaire, il y a maintenant l’avocat personnel de M. Trump, Michael Cohen, avec son marécage personnel de fichiers incriminants et d’enregistrements audio. Entrez, à gauche et voici David Pecker, éditeur du vénérable National Enquirer – le journal des chats crevés – avec son sillage de témoignages induits. Et il y a votre infraction passible d’un « impeachment » : une contribution de campagne illégale.

D’une manière ou d’une autre, comme le chantait Blondie, « Je vais t’avoir ! ».

Certains dans cette plus grande de toutes les républiques possibles se demandent peut-être s’il s’agit là d’un jeu équitable, compte tenu des centaines de millions de dollars blanchis par la laverie automatique connue sous le nom de Fondation Clinton et des actions suspectes perpétrées dans ce camp de ténèbres. Mais rappelez-vous, un autre président, Jimmy Carter, a déjà déclaré, choquant le tout Washington, que « la vie est injuste ».

Ce que je me demande, c’est ce que ces chiens de la vengeance vont faire quand ils atteindront leur objectif de faire tomber notre taureau, beuglant et perdant ses tripes. Peut-être quelques moments de satisfaction tribale, une dernière danse de guerre autour du feu, mais quand le feu s’éteindra, ils se retrouveront sous la même lune froide et indifférente avec du sang sur leur truffe et un vent mauvais soufflant dans la cime des arbres.

Après deux années d’hystérie, les « gagnants » vont percevoir la réalité derrière tout le mélodrame : les rackets de financiarisation qui ont remplacé l’économie se sont délités et les institutions ont commencé à s’affaisser : banques, fonds de pension, gouvernements étatiques et municipaux, les promesses fédérales de payer ceci et cela et, en général, la capacité des États-Unis à mener à bien tout ce qui pourrait être considéré comme une vie normale.

Il sera intéressant de voir comment la mise en accusation de Donald Trump va se passer dans ces conditions. J’imagine que les gens avertissant d’une seconde guerre civile ne sont pas loin du compte. La conséquence finale d’une économie politique basée sur la proposition que tout va bien et que rien ne compte sera la triste découverte que les conséquences existent réellement, et par conséquent que tout ne peut pas aller et que certaines choses importent vraiment : Comme savoir si l’argent vaut ce qu’il prétend ou pas.

Cette question sera certainement déterminée par la possibilité pour les emprunteurs d’argent de rembourser ce qu’ils doivent. La découverte d’une impossibilité coïncidera avec le sort juridique de la présidence de Donald Trump. Le résultat de tout cela peut être un cauchemar politique de faillite et d’effusion de sang faisant ressembler la première guerre civile (1861-1865) à une histoire de chevalerie en fleur.

Nos modes de vie nationaux sont beaucoup trop fragiles. Les joueurs des deux côtés de ce terrible jeu doivent supposer que les fondations de la vie américaine sont robustes, et ils ont tout à fait tort à ce sujet. Les élites ne sont plus en contrôle. La loi de Murphy est en vigueur et nous sommes sur le point de découvrir en quoi cette loi diffère des lois électorales fédérales et de la banalisation de la mise en accusation abusive simplement comme le fait du Roi.

James Howard Kunstler

Too much magic : L'Amérique désenchantéePour lui, les choses sont claires, le monde actuel se termine et un nouveau arrive. Il ne dépend que de nous de le construire ou de le subir mais il faut d’abord faire notre deuil de ces pensées magiques qui font monter les statistiques jusqu’au ciel.

Traduit par Hervé, relu par Cat pour le Saker Francophone

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