La vengeance de Comet Pizza


Par James Howard Kunstler – Le 24 février 2017 – Source kunstler.com

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Tu t’en souviens ? C’était presque aussi bizarre que ça en avait l’air. Un mème généré à partir du volumineux piratage des mails de John Podesta que certains connaisseurs de conspiration ont cuisiné avec une histoire de pédophilie satanique tournant autour d’une certaine pizzeria tape-à-l’oeil de Washington DC. Je n’ai jamais avalé cette histoire, mais c’est une indication intéressante pour savoir jusqu’où les frontières de la psychologie de masse pourraient être poussées dans des guerres psychologiques autour de la politique.


Le sexe, bien sûr, est dangereux. Le sexe et les sentiments qu’il évoque tracent un chemin direct jusqu’au système limbique, où les pensées les plus primitives obtiennent la paternité des actes les plus primitifs. Dans notre monde américain, ce royaume des pensées et de l’action est devenu un jeu politique avec la gauche et la droite se crêpant le chignon férocement pour être en position de force sur le terrain – alors que le programme politique réel concernant tout le reste de ce qui est vraiment important, en dehors du sexe, se trouve à l’extérieur du stade.

L’histoire de Comet Pizza était de manière compréhensible censée bouleverser les démocrates qui ne devaient pas aimer être dépeints comme des agresseurs d’enfants. Malheureusement pour eux, cela a coïncidé avec le buzz autour d’Anthony Weiner – et de son infâme ordinateur portable – déshonorant l’ancien congressiste « obsédé sexuel », mari de l’assistance principale d’Hillary, Huma Abedin. L’ordinateur portable contiendrait beaucoup de pornographie infantile.

Cette barge d’allégations sexuelles et d’insinuations n’a pas aidé la campagne d’Hillary, sans compter les histoires autour de la Fondation Clinton, dans sa marche vers sa défaite électorale. Je soupçonne que l’obscurité profonde autour de cette affaire a engendré l’hystérie « C’est-les-Russes » qui a encombré le ciel des médias pendant le premier mois de la Trumptopia. Le Surmoi collectif de l’Amérique se roule de honte et de rage.

Du côté conservateur, on trouve le curieux personnage de Milo Yiannopoulos, le soi-disant « dangereux pédé », qui a fait une carrière sensationnelle dernièrement comme provocateur idéologique ; surtout sur les campus, où il s’est mis à dos les maoïstes indignés avec sa spécialité consistant à repousser les frontières du politiquement correct pour les forcer à avoir recours à des perturbations violentes des conférences prévues, obligeant les organisateurs à le désinviter au dernier moment ou à finalement gérer une émeute, comme dans le cas de Berkeley il y a quelques semaines.

Les batailles autour de Milo sur le campus étaient particulièrement mûres parce que ses adversaires d’extrême gauche sont eux-mêmes à exposer leur marque de fabrique poussant la promotion de l’agenda LGBTQ. On pourrait penser que ces deux dernières années, la moitié de la population étudiante est tombée dans une des catégories de sexe « non binaire » et que c’est devenu la mission la plus urgente de la gauche d’obtenir des droits d’accès aux toilettes et de faire respecter de nouveaux pronoms personnels pour s’adresser aux orientations sexuellement ambiguës.

Mais Milo a commis une erreur tactique. En dépit de toutes les frontières mutuellement repoussées de chaque côté, il a poussé une frontière trop loin et il est entré dans le cercle du plus sombre des tabous : les violences faites aux enfants. C’est là que les hystériques puritains lui sont tombés dessus. C’est ce qu’il a dit lors d’un talk-show sur le Web :

« Ce qui arrive souvent dans les écoles, très souvent même, c’est que vous avez des femmes plus âgées qui sortent avec des garçons plus jeunes, et c’est le garçon qui est le prédateur dans cette situation. Le garçon pense ainsi : voyons voir si je peux me faire la professeur de gymnastique, la professeur de maths si chaude, et il le fait. Les femmes s’amourachent de ces jeunes garçons nubiles dans leur prime jeunesse. Si nous nous accrochons strictement à l’idée d’abus d’enfants du point de vue où il faut surveiller les adultes entreprenants, les étudiants diplômés et leurs professeurs, cette idée arbitraire et oppressive de consentement détruit totalement la compréhension que beaucoup d’entre nous ont sur les intrications, les subtilités et la nature complexe de beaucoup de relations. Dans le monde homosexuel, en particulier, certaines des relations entre les jeunes garçons et les hommes plus âgés, des relations où ces aînés aident ces jeunes garçons à découvrir qui ils sont, leur donnant de la sécurité et de l’amour … . » [Milo est alors hué par ses hôtes organisant le podcast].

C’était donc la goutte qui a fait déborder le vase. Milo a été largué par son hébergeur, Breitbart News, et a dû se plier au cérémonial – maintenant routinier, obligatoire, abject de l’excuse télévisée exigée par les célébrités ayant dépassé la mesure – bien qu’il ait prétendu, avec une certaine justification je pense, que ses remarques ont été mal interprétées. Quoi qu’il en soit, je suis sûr qu’il va rebondir sur sa propre plate-forme web et qu’il sera de nouveau en action sous peu.

Ses remarques sur la période d’« arrivée à l’âge adulte » m’ont amené à m’interroger sur les facteurs délimitant la gauche, notamment sur les campus des lycées, qui encouragent les jeunes à en passer par des chirurgies dures de changement de sexe, à un âge où le développement de la partie de leurs lobes frontaux contrôlant le jugement n’est pas encore terminé. Qui sont ces doyens de la diversité et leurs conseillers LGBTQ, qui conduisent des adolescents confus à l’auto-mutilation dans leur recherche d’une « identité » hypothétique ? Quelle que soit leur identité, cette dynamique semble assez téméraire et probablement tragique pour moi. Il devrait y avoir un doute raisonnable sur une chirurgie irréversible de « réaffectation sexuelle » qui pourrait ne pas mener au bonheur personnel quelques années plus tard – quand, par exemple, les lobes frontaux de cette personne se sont développés et qu’elle commence à éprouver des émotions profondes et compliquées comme le remord.

Notre hystérie sexuelle a beaucoup d’autres angles bien curieux. Nous vivons dans une culture où la pornographie, jusqu’aux dernières limites de la bizarrerie et de la dépravation, est accessible aux jeunes personnalités non formées en un clic de souris. Nous avons cessé de protéger les adolescents contre cela il y a des années, alors pourquoi devrions-nous être surpris quand ils s’aventurent dans les frontières toujours plus sombres de la sexualité ? C’est la gauche qui a cherché à abolir les frontières autour du sexe et dans de nombreux autres domaines de la vie américaine. Et pourtant, elle affecte encore d’être choquée par quelqu’un comme Milo.

Je maintiens qu’il y a une relation dynamique entre notre incapacité à agir sur les questions vraiment urgentes du jour – l’énergie, l’économie et la géopolitique – et notre préoccupation névrotique concernant l’identité sexuelle. La quantité épique d’énergie psychique collective détournée de ce qui est important dans ces fictions sexuelles, la titillation, la confusion et les litiges, nous laissent pathétiquement non préparés à faire face à la crise, beaucoup plus grave, de civilisation qui se prépare devant nous.

Post-scriptum : Cet article du journal The Stanford [University] Daily met en lumière la stupéfiante bêtise du débat sur le sexe et l’identité sur ce campus. « Les toilettes à occupation unique sur le campus seront bientôt converties en genre-neutre, en raison de la nouvelle législation de la Californie et des efforts administratifs continus. Le Bureau de la diversité et de l’accès (D & A Office) a été le fer de lance de la campagne visant à convertir toutes les toilettes à occupation unique… ».

Voici ce que je ne capte pas : si une toilette à occupation unique doit être utilisée par une personne à la fois, quel besoin est-il de désigner officiellement le sexe de toute personne devant l’utiliser ? Et pourquoi les fonctionnaires d’une université d’élite perdent-ils leur temps sur ce sujet ?

James Howard Kunstler

Note du Saker Francophone
Pour le pizzagate, le sujet reste ouvert, tant les affaires de pédophilie se succèdent (BBC, Dutroux, etc.), mêlant des membres des classes dirigeantes. Même si le doute reste de rigueur, il semble que l'étau se resserre. Si ces scandales devaient être avérés, cela aurait un effet bien plus dévastateur que les misérables magouilles financières étalées ces jours-ci. Par contre, il est important de bien cerner ces articles de Kunstler sur les délires autour des identités sexuelles dans les facs américaines, car la théorie du genre qui y avait été incubée a fini par arriver chez nous. Il est fort probable que ces débats apparaîtront bientôt chez nous, ne serait-ce que pour détourner l'opinion publique des réalités économiques.

Traduit par Hervé, vérifié par Julie, relu par M pour le Saker Francophone

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