Obama: Le Venezuela est une menace pour la sécurité nationale

Par Eric Zuesse – Le 10 mars 2015 – Source Global Research

L’administration Obama [prix Nobel de la Paix, NdT], qui en 2009 a fourni l’assistance cruciale pour renverser le président démocratique progressiste du Honduras et le remplacer par une junte d’oligarques; et qui en 2014 a perpétré le sanglant coup d’État qui a remplacé le corrompu, mais démocratiquement élu président ukrainien Viktor Ianoukovitch, par un gouvernement tout aussi corrompu mais farouchement anti-russe, déclenchant ainsi une guerre civile contre l’est de l’Ukraine qui avait voté à 90% pour M. Ianoukovitch; cette administration essaie maintenant à nouveau de renverser le président démocratiquement élu du Venezuela, Nicolas Maduro.

Lundi 9 mars, Reuters publie «Les États-Unis déclarent que le Venezuela menace leur sécurité nationale, et sanctionnent des hauts fonctionnaires», leur rapport donne le mot de la fin à un politicien de l’opposition, soutenu par Obama et qui dit: «Ce n’est pas un problème avec le Venezuela ou les Vénézuéliens; c’est un problème avec ceux qui sont corrompus» (c’est à dire, Maduro et son gouvernement).

En d’autres termes, une fois encore, le sempiternel prétexte promu par Obama: nous essayons simplement de remplacer un chef d’État élu corrompu.

La Maison Blanche explique son décret le 9 mars en disant: «Le président Obama a publié aujourd’hui un nouveau décret exécutif (EO) déclarant une urgence nationale suite à la menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité nationale et la politique étrangère des États-Unis posée par la situation au Venezuela. (…) Plus précisément, le décret cible les menaces décelées par le Département du Trésor, en consultation avec le Département d’État, impliquant le Venezuela dans des actions (…) ou des politiques qui sapent les processus ou les institutions démocratiques.»

Le décret lui-même déclare que le gouvernement du Venezuela est corrompu et limite les droits humains, ce qui «constitue une menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité nationale et la politique étrangère des États-Unis, et je déclare par la présente une urgence nationale pour faire face à cette menace.»

Le 14 février 2015, le président Maduro avait déjoué un coup d’attentat fomenté par les gouvernements du Canada et du Royaume-Uni. Ces événements ont eu lieu presque exactement un an après qu’il avait déjà déjoué une tentative similtaire du gouvernement américain. En décembre 2013, le gouvernement de Maduro avait présenté des preuves détaillées que les Etats-Unis planifiaient un coup contre lui.

Le 15 janvier 2015, Maduro a rencontré le président russe Vladimir Poutine au Kremlin. L’administration Obama essaie évidemment de faire également tomber le président Poutine.

Le président Obama s’efforce également d’abattre le président Bachar al-Assad en Syrie. En 2011, il avait bombardé le régime du président Mouammar Kadhafi en Libye pour se débarrasser de lui. Tant Assad que Kadhafi sont aussi ou ont été des alliés de la Russie, comme l’Iran. L’administration Obama aide l’État Islamique dans sa guerre contre Assad, alors que dans le même temps, il le bombarde*.

Eric Zuesse 

L’auteur est historien d’investigation. Il a écrit récemment, They’re Not Even Close: The Democratic vs. Republican Economic Records, 1910-2010, et CHRIST’S VENTRILOQUISTS: The Event that Created Christianity.

Note du Saker Francophone
*Cet état de fait apparemment illogique est la conséquence de l’hyper-désordre qui règne à Washington en matière de politique étrangère du fait des luttes de pouvoir intestines entre le Pentagone et les agences de renseignement, d’une part, et d’autre part le département d’État. Obama n’étant pas désireux, ou tout à fait impuissant voire incapable, de remédier à cette situation. Cet hyper-désordre se reflétant d’ailleurs dans l’ensemble des conflits provoqués par l’hybris de l’Empire du néant.

Traduit par jj, relu par Diane pour le Saker Francophone

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Encore une volte-face de Netanyahou que les États-Unis ignoreront

Le 9 mars 2015 – Source Moon of Alabama

Le Premier ministre israélien Netanyahou doit faire face à deux publics différents. Un public étranger qui parraine et protège sa colonie raciste d’Européens de l’Est [connue sous le nom d’Israël, NdT] en Asie de l’Ouest [en Palestine pour être précis, NdT], et les colons eux-mêmes [les Israéliens donc, NdT] qui votent pour lui. Cela exige une rhétorique assez tortueuse et engendre des couacs intellectuels.

Pour attirer les électeurs, Netanyahou doit affirmer que les terres occupées ne seront jamais rendues à leurs propriétaires légitimes. Pour recevoir le soutien des États-Unis, il doit promettre que la terre volée sera restituée. Ces positions sont d’autant plus difficiles à unifier que Netanyahou les soutient toutes les deux en même temps.

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Le coup d’état « secret » de Victoria Nuland en Géorgie

Par Henry Kamens – Le 4 mars 2015 – Source NEO

Attention! Quelque fois elle mord…

L’ancien président de Géorgie Mikheil Saakachvili répète depuis six mois qu’il reviendra dans six mois! Aucune élection n’est prévue et il ne peut pas redevenir président. Maintenant, malheureusement, nous savons ce qu’il entendait par là.

Le 17 février, Victoria Nuland, la Secrétaire d’État adjointe états-unienne, s’est rendue à Tbilissi. Elle est surtout connue pour être une ardente partisane du coup d’État de Kiev d’il y a un an, qui a amené le renversement violent du président alors en exercice, Victor Ianoukovitch, et la poursuite des affrontements dans ce pays proche de la faillite. Elle est apparue à Tbilissi au moment où Saakachvili est devenu officiellement conseiller du nouveau président de l’Ukraine, Petro Porochenko.

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Le patriote russe et les saltimbanques français

Leçon de Vladimir Poutine à Marine Le Pen et au FN

Extraits des échanges entre Vladimir Poutine et des journalistes après son intervention au forum de Valdaï, le 24 octobre 2014.

Version originale (russe) : http://www.kremlin.ru/news/46860

Version anglaise : http://eng.kremlin.ru/news/23137

Traduction en français & vidéo : http://www.sayed7asan.blogspot.fr

Vidéo sous-titrée en français: Le patriote russe et les saltimbanques français : leçon de Vladimir Poutine à Marine Le Pen et au FN

Dans ces extraits, Vladimir Poutine dénonce explicitement la transformation pernicieuse du patriotisme en chauvinisme et en xénophobie, idéologies dangereuses dont le Front national français s’est fait le champion. Tout en s’affirmant lui-même le premier patriote de son pays, le Président russe revendique hautement son attachement à une Russie multiethnique et multiconfessionnelle, en rappelant que quoique séculaire, l’État russe reconnait légalement quatre religions traditionnelles. Et bien que la proportion de musulmans soit moindre en Russie qu’en France, l’Islam y est reconnu par la loi comme la deuxième religion nationale, ce qui contraste avec la situation française, et le discours du Front national en particulier, qui cible prioritairement les populations immigrées, les musulmans et l’islam alors que la Russie les considère comme des composantes à part entière de l’identité russe et une véritable richesse. Pour Vladimir Poutine, de telles politiques sont irresponsables car elles mènent à l’autodestruction des sociétés et des Nations et ne peuvent en aucun cas servir les intérêts du peuple. Par cette stratégie ignoble et manipulatoire du bouc émissaire, le Front national se révèle comme un ennemi de la France et du peuple français dans son ensemble.

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L’avenir que Kadhafi avait prédit

Par Ahmad Barqawi – Le 9 mars 2015 – Source CounterPunch

La Libye, ISIS et le luxe sans prix de la sagesse rétrospective

«Qui êtes-vous?», a demandé un jour, vers la fin de son règne, feu Mouammar Kadhafi dans un discours célèbre où il remettait en cause (à juste titre) la légitimité de ceux qui, à l’époque, cherchaient à renverser son gouvernement, en les qualifiant d’extrémistes, d’agents étrangers, de rats et de toxicomanes. On s’est moqué de lui, on l’a caricaturé, ridiculisé et diabolisé; une ignoble vidéo parodique tournant en dérision le leader libyen s’est propagée sur les réseaux sociaux; l’auteur de la vidéo, un Israélien, trouvait sans doute le mot libyen d’arabe courant Zenga (qui signifie une ruelle) si drôle qu’il l’a extrait de l’un des discours de Kadhafi, l’a mis en boucle sur un air de hip-hop et voilà* … il a fait un hit qui a été diffusé largement (et honteusement) avec un zèle révolutionnaire dans le monde arabe. Nous l’avons partagée, nous avons ri, il est mort.

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Le Moyen- Âge? Les oubliettes?
Que nenni, la démocratie US en action

Le 8 mars 2015 – Source Russia Today

Manifestation à Chicago pour la fermeture d’une prison secrète et la fin des disparitions de civils.

Un activiste devant le « black site » de Chicago. (Reuters / Jim Young)

Des manifestations ont eu lieu à Chicago pour demander que la police ferme un entrepôt autrefois abandonné et qui est apparemment utilisé pour interroger des suspects sans qu’ils aient accès aux recours légaux.

Ce lieu de détention, qui fut porté a la connaissance du public par un article du Guardian en février dernier, est un ancien entrepôt situé à l’ouest de Chicago et connu sous le nom de Homan Square, qui a «longtemps été la scène d’activités secrètes par les unités des Forces spéciales», a révélé le journal.

Même si beaucoup d’Américains sont au courant de la militarisation de leurs forces de police, avec le soutien du gouvernement fédéral qui permet à ces forces de recevoir de l’équipement militaire, dont des tanks et des armes à feu puissantes, la nouvelle que des méthodes d’interrogation spéciales sont aussi utilisées a scandalisé.

L’activiste Brian Jacob Church, qui prétend avoir été incarcéré dans cet endroit en 2012, s’est adressé à la foule rassemblée à Homan Square samedi dernier.

«Pendant trop longtemps, nous les Américains avons été soumis à la brutalité policière… Spécialement les noirs, les pauvres et les latinos, selon les propos de Church rapportés par The Guardian. Ce bâtiment doit être fermé.»

Une manifestation identique s’était déjà tenue le 1er mars.

Cet endroit controversé ne semble pas fonctionner comme un poste de police normal où les suspects sont inscrits dans un registre accessible au public.

A Homan Square, pas d’enregistrement visible, si bien que les personnes comme Chuch qui s’y trouvent emprisonnées, quel que soit le motif, disparaissent sans laisser aucune trace.

«Homan Square est vraiment un endroit pas comme les autres, a dit Church au Guardian le mois dernier. Cela rappelle les centres d’interrogatoire qu’ils utilisent au Moyen-Orient. La CIA les appelle des Black Sites. Celui-ci est un black site domestique. Lorsque tu y rentres, plus personne ne peut savoir ce qui t’arrive

«Ils disparaissent, tout simplement » affirme Anthony Hill, un avocat, jusqu’à ce qu’ils réapparaissent devant une cour ou soient juste relâchés dans la rue.»

Au moins une association civile a critiqué le maire de Chicago, Rahm Emanuel,  occupé actuellement par sa campagne électorale, pour ne pas prêter attention à de possibles violations des droits humains dans ce site.

«C’est un sujet sensible maintenant, car le maire actuel est en campagne pour sa réélection dans quelques semaines et qu’il ne désire pas faire la moindre déclaration à propos de la situation à Homan. Ni sur le côté secret des arrestations, ni sur les possibles tortures lors des interrogatoires», selon Donald Goldhamer le trésorier du comité de défense des droits civils, cité par Sputnik.

Goldhamer dit que le sujet des interrogatoires abusifs à Homan a été soulevé depuis des années par les avocats, mais la ville n’en a jamais tenu compte.

«Le fait que la police cache certaines personnes qu’elle arrête a été discuté avec la police de Chicago et le comité de surveillance, mais ces efforts n’ont amené aucun résultat», dit encore Goldhamer.

Le Département de police de Chicago nie toute participation à ces internements et interrogations supposés à Homan Square.

Traduit par Wayan, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone

 

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Ukraine:
La démocratie de la baston
Les néo-nazis s’entre-dévorent

Par Le Saker original – le 8 mars 2015 – Source thesaker.is

Mon monstre favori à Kiev est l’infâme Oleg Liashko, qui amuse le monde toutes les semaines avec un nouveau scandale. Le dernier en date est un combat avec Sergei Melnichuk, le chef de l’escadron de la mort Aïdar. Sachant que Liashko a été élu grâce au prétendu soutien des membres d’Aïdar, il est assez cocasse de voir les deux hommes s’accuser mutuellement de trahison. Jugez par vous-même
sur la vidéo (sous-titres anglais [mais l’ambiance vaut le coup d’oeil, NdT]).

https://www.youtube.com/watch?v=iPSHIBdskfE

Bien sûr, l’importance de cette dernière confrontation entre les monstres réside dans le fait de la crise bien réelle à Kiev et dans le spectacle des nazis qui s’entre-déchirent en s’accusant mutuellement d’être des agents de Moscou. Que la paranoïa concernant les agents russes soit partout est aussi une bonne nouvelle car elle crée une atmosphère de panique, de suspicion, et ce chaos va certainement contribuer à la chute du régime actuel.

Sergei Melnichuk

Hélas, la question est de savoir si le prochain régime au pouvoir sera meilleur ou pire. Mon sentiment personnel est que ce sera encore pire ou que, à tout le moins, la toxicité sera plus visible. Pourtant, ce processus est probablement une fatalité historique et, selon l’expression consacrée, l’Ukraine devra toucher le fond pour se ressaisir à nouveau.

The Saker

Traduit par jj, relu par Diane pour le Saker Francophone

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Les États-Unis n’ont qu’une logique : celle du chaos

Par Michel Raimbaud – Le 3 mars 2015 – Source Afrique-Asie

Interview par Majed Nehmé, Augusta Conchiglia et Hassen Zenati

Ancien ambassadeur français en Mauritanie, au Soudan et au Zimbabwe, l’écrivain Michel Raimbaud* vient de publier Tempête sur le Grand Moyen-Orient, un ouvrage qui s’annonce déjà comme un classique de la géopolitique moyen-orientale et eurasienne. Il revient sur ce projet élaboré par les néoconservateurs américains qui a non seulement déstabilisé le monde arabo-musulman, reconfiguré les relations internationales, mais fait désormais des vagues jusqu’en Europe, avec la violence qu’on connaît.

Vous avez placé en épigraphe de votre livre cette citation de Voltaire :

« Pour savoir qui vous dirige vraiment, il suffit de regarder ceux que vous ne pouvez pas critiquer. » De qui parlez-vous ?

Il suffit de voir autour de soi. La maxime s’applique à ce qu’on appelle le pouvoir profond… On ne peut pas critiquer certaines catégories de personnes et les sujets qui vont avec, dont ceux que je traite dans ce livre. Ce sont ces sujets sensibles.

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Comment Poutine a bloqué le pivot des États-Unis vers l’Asie

Par Mike WHITNEY – Le 6-8 mars 2015 – Source CounterPunch

«L'effondrement de l'Union soviétique a supprimé la seule limite au pouvoir de Washington qui l’empêchait d'agir unilatéralement à l'étranger... Soudain, les Etats-Unis se sont retrouvés le seul pouvoir, la seule superpuissance mondiale. Les néoconservateurs ont proclamé la fin de l'histoire.»

Paul Craig Roberts, ancien secrétaire adjoint du Trésor Américain

Proverbe russe
«
Ce n’est pas la faute du miroir si votre visage est tordu.»

Le 10 Février 2007, Vladimir Poutine a prononcé un discours à la 43e Conférence sur la sécurité de Munich qui a ouvert un fossé entre Washington et Moscou, fossé qui n’a fait que s’approfondir au fil du temps. Une heure durant, le président russe a critiqué de manière cinglante la politique étrangère américaine, se livrant à un acte d’accusation en bonne et due forme des interventions américaines dans le monde entier et de leur effet dévastateur sur la sécurité du monde. Poutine n’a probablement pas réalisé l’impact qu’aurait son réquisitoire sur l’assemblée réunie à Munich, ni la réaction des éminences grises états-uniennes, pour qui ces déclarations ont représenté un tournant dans les relations américano-russes. Mais, le fait est que l’hostilité de Washington envers la Russie remonte à cet incident particulier, à ce discours dans lequel Poutine s’est engagé publiquement en faveur d’un système mondial multipolaire, rejetant par là-même les prétentions à un Nouvel ordre mondial des élites américaines. Voici ce qu’il a dit:

«Je suis convaincu que le moment est venu de réfléchir sérieusement à l’architecture de la sécurité internationale. Et nous devons rechercher un équilibre raisonnable entre les intérêts de tous les participants au dialogue international

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Vote au parlement italien sur le reconnaissance de l’État palestinien
Nains, danseuses et domestiques.

Par Fabrizio Marchi – Le 4 mars 2015 – Source Sinistra in Rete

Nains, danseuses et domestiques acclamés. Je parle naturellement de la quasi-totalité de l’actuelle classe politique qui gouverne (pour le compte de tiers…), directement ou indirectement, ce pays. Nous le savions déjà, mais le vote d’hier à la Chambre sur la reconnaissance manquée de l’État de Palestine le confirme encore une fois, si toutefois il en était encore besoin.

Unique exception – nous le notons scrupuleusement –, celle du M5S [le Mouvement 5 étoiles de Beppe Grillo], c’est-à-dire la seule force politique qui, malgré toutes ses contradictions structurelles, a demandé la reconnaissance immédiate de l’État palestinien, sans conditions et sans réserves, comme on dit.

Le parti unique qui nous gouverne (y compris la Ligue du Nord et le maquis rose fuchsia à la gauche du PD [le parti de Renzi], c’est-à-dire le SEL [Gauche Ecologie Liberté]), dont les membres feignent de se disputer dans les divers talk-shows [débats télévisés], n’a même pas été capable de voter ce qui n’aurait été guère plus qu’une motion d’intentions (mais avec une certaine valeur symbolique), et qui n’aurait de toutes façons entraîné aucune retombée concrète sur la réalité de ce qu’on appelle la crise israélo-palestinienne, c’est-à-dire l’occupation néo-coloniale et raciste à laquelle est soumis depuis des dizaines d’années le peuple palestinien par l’État d’Israël et tous ses gouvernants, sans aucune exception.

Il ne vaudrait même pas la peine de commenter la ridicule pantomime qui s’est produite hier (on était aux limites du comique démentiel avec le vote sur les deux motions, celle du PD, soutenue aussi par le SEL, et celle d’Area Popolare, regroupant NCD et UDC [nouveau parti de centre-droit, sur le modèle du PP espagnol]), si ce n’était pour souligner qu’il y a peut-être des manières relativement plus dignes de servir ses maîtres, par exemple en faisant semblant d’avoir une certaine autonomie politique. Au fond, c’est à cela que servait ou aurait pu servir hier un vote en faveur de l’État de Palestine.

Mais même pour cela, il faut un brin de dignité et de stature (c’est incroyable d’avoir à le dire, mais c’est ainsi…), que cette classe politique ne possède pas.

Certes, nous ne nous attendions à rien d’autre, mais il ne peut échapper à personne qu’au moins la classe politique de ce qu’on appelle la Première République [le régime instauré après la Libération] cherchait à s’acquitter du rôle qui lui avait été attribué à l’intérieur de l’alliance politico-militaire occidentale, avec une marge relative d’autonomie politique, d’équilibre et de capacité de médiation réelle dans ce qui était son aire géopolitique de compétence, c’est-à-dire le bassin de la Méditerranée.

Je crois pouvoir dire, sans aucune nostalgie passéiste, que cette classe politique, formée par ces forces politiques (je veux parler en particulier de la DC, du PSI et du PCI, globalement réunis en ce qui concerne la position politique de l’Italie dans l’aire méditerranéenne et moyen-orientale), se serait comportée avec plus de dignité et de sens de l’État. Par honnêteté intellectuelle, on ne peut pas ne pas rappeler le célèbre discours à la Chambre du 6 novembre 1985 par lequel celui qui était alors secrétaire du PSI en même temps que Président du Conseil, Bettino Craxi, défendit le droit légitime des Palestiniens à la lutte armée pour libérer leur terre de la puissance occupante, se livrant même à une comparaison audacieuse entre le mouvement de libération nationale palestinien et celui du Risorgimento mazzinien.

Pour ne pas parler du célèbre épisode de Sigonella en octobre de la même année, où le même Craxi interdit aux marines US de capturer un commando palestinien du FPLP qui avait séquestré un bateau de croisière italien – l’Achille Lauro – et tué un passager américain de confession juive. L’avion sur lequel voyageaient les membres du commando palestinien fut encerclé par les carabiniers (qui empêchèrent, arme au poing, les marines de les faire prisonniers), puis fut autorisé à repartir pour l’ex-Yougoslavie, alors État souverain non-aligné gouverné par la Ligue des communistes du Maréchal Josip Broz Tito. Cet épisode provoqua un moment de grave tension dans les rapports entre les gouvernements italien et américain, et relança le rôle de l’Italie sur l’échiquier moyen-oriental en tant que pays non hostile aux peuples arabes, en continuité avec une politique de coopération et collaboration avec les pays maghrébins et méditerranéens déjà initiée en son temps par le président de l’ENI, Enrico Mattei (qui fut pour cela assassiné par les multinationales du pétrole US). Certains soutiennent que les États-Unis et Israël ne devaient pas oublier cet affront et que la  disgrâce postérieure de Craxi eut quelque chose à voir avec sa politique d’ouverture à l’égard de l’OLP et en général des gouvernements nationalistes laïques arabes, bien au-delà des vicissitudes de la tangentopolis [scandale politico-financier des pots de vin, déclenché en 1992] .

Ceci ne fait évidemment pas de Craxi, ni d’Andreotti et en général de la classe politique qu’ils représentaient, des héros de la lutte des peuples du monde contre l’impérialisme, mais nous offre un témoignage concret du niveau de l’actuelle classe politique. Si Craxi fut le protagoniste de ce qui fut objectivement un grand sursaut d’autonomie nationale (dans les limites de l’appartenance de l’Italie à l’Otan, dont Craxi ne rêvait même pas de sortir), de dignité et de sens de l’État, capable même d’aller jusqu’à pointer les fusils contre des soldats américains, nos gouvernants, Renzi en tête, (mais cela vaut pour tous ses prédécesseurs, de Berlusconi à D’Alema et les autres), ne sont même pas capables d’empêcher un groupe de voyous ivres de profaner la Barcaccia (1), comme ils ne seraient pas en état d’aligner une patrouille de la police urbaine pour empêcher un groupe de touristes américains de prendre un bain dans la fontaine de Trevi…

Une dernière réflexion politique, mais absolument pas marginale. La Ligue du Nord de Salvini a voté contre l’État de Palestine en faisant une déclaration explicitement pro-israélienne. Cela en dit long, s’il en était besoin, sur la nature réelle de cette force politique néo-fasciste ou néo-droitière. Une force de feinte opposition au système, alignée en réalité sur des positions pro-atlantistes – au-delà des sympathies manifestées à la Russie de Poutine et même à la Corée du Nord (façon de jeter de la poussière aux yeux de la partie culturellement la plus faible de son électorat) – même si elle se vante d’un supposé anti-américanisme et anti-européisme qui n’a rien à voir avec une critique authentiquement de classe et anti-impérialiste, mais représente seulement la nostalgie de cette partie des anciennes classes bourgeoises qui n’ont pas été invitées à la répartition du gâteau du grand capital trans- et multinational, par cet État-nation à l’intérieur duquel elles étaient politiquement hégémoniques. Une force politique qui nourrit à dessein une haine confuse (camouflée d’ethno-identitarisme, c’est-à-dire de défense des identités culturelles) à l’égard des peuples arabes et musulmans, et dont l’horizon culturel est la construction d’un État hiérarchique, autoritaire, sécuritaire, interclassiste, identitariste, exclusiviste et différentialiste (c’est-à-dire raciste…), mais toujours à l’intérieur des logiques économiques capitalistes.

Il convient de ne pas se laisser tromper par ces gens, très habiles dans ces opérations de maquillage par lesquelles beaucoup de personnes de bonne foi tendent hélas à se laisser conditionner, surtout en l’absence d’une alternative politique solide, crédible et authentiquement socialiste dans l’actuel état de choses.

Note

(1) Fontaine du Bernin, en forme de barque, récemment dégradée par des
hooligans hollandais du Feyenoord.

Traduit par Rosa Llorens

 

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